MAIS QUE FOUTENT LES EDITEURS (Part 2)
Amnesiascope, de Steve Erickson. Curieux destin que celui de Steve Erickson. Lançé en fanfare dès son premier roman (Les jours entre les nuits) par un blurb de Pynchon (« Daring, haunting, sensual. . . . Steve Erickson has that rare and luminous gift for reporting back from the nocturnal side of reality, along with an engagingly romantic attitude and the fierce imaginative energy of a born storyteller. It is good news when any of these qualities appear in a writer -- to find them all together in a first novelist is reason to break out the champagne and hors-d'oeuvres. »), considéré dès lors comme l’héritier dudit Pynch et de DeLillo, il fut peu à peu éclipsé par une nouvelle génération de légataire plus tape-à-l’œil (De DFWallace à R Moody). Outre le fait qu’on peut difficilement être l’héritier à la fois de la carpe et du lapin, Steve Erickson n’a vraisemblablement guère fait cas de ces étiquettes et a poursuivit son chemin. Nul doute qu’il possède un univers singulier et constitue, livre après livre, une œuvre dont la somme vaut peut-être mieux que certaines de ses parties. Son lyrisme morbide romantique visionnaire et apocalyptique en font un auteur véritablement à part dans les lettres américaines, chacun de ses romans renvoyant sur le fond comme sur la forme aux précédents, avec de nombreuses intersections et connexions, œuvre à tiroirs faite d’une multiplicité de réalités, parfois contradictoires, toujours passionnantes. Emergent en particulier de ce courant trouble ces pépites que sont Les Tours du Cadran Noir, Arc d’X, Our Ecstatic Days (son expérience narrative la plus radicale – qui prend toute son ampleur à la deuxième lecture) et Amnesiascope, certainement son chef-d’œuvre, même si un rien décalé par rapport aux autres ouvrages, parce que plus autobiographique, peut-être à cause de cela. Erickson y met en effet en scène un double, vivant dans un Los Angeles futuriste, dévasté. Se rapprochant davantage de ses deux non fiction quasi Gonzo, Leap Year et American Nomad, le narrateur, S, y déambule dans une cité post apocalyptique, flâne dans les ruines de la ville, de la mémoire, monologuant sur le travail de l’écrivain, le sexe, la science, la politique, la création. Si vraiment il fallait aller chercher des références pour décrire cette ballade hallucinée, c’est du côté d’un improbable mélange de Hunter Thompson, Rudy Wurlitzer, JG Ballard et Richard Powers qu’on le trouverait. Un long blues hypnotique, un livre hanté, comme une note dissonante dans l’oeuvre d’Erickson, un livre indispensable. (Coup de chapeau pour finir à sa superbe revue Black Clock (http://blackclock.org/), la meilleure revue de littérature américaine du moment – bien au-delà du Believer selon moi).
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